PARDONNER. QUAND MÊME.

Hélène Constantin est formée en physiothérapie et en philosophie, mère au foyer et catéchiste.
Elle est maman de quatre enfants et mariée à Nicolas.

Cette année, en préparant des enfants au sacrement du pardon comme catéchiste, je me suis retrouvée face à un cas de conscience : comment expliquer la beauté du pardon aux enfants, l’importance de se remettre en question et de pardonner, alors que moi-même, je me retrouve bloquée dans une situation blessante dans laquelle il m’est si difficile de pardonner ? Pas possible d’y échapper lorsque je lis chaque matin l’évangile du jour en ce temps de carême… presque chaque jour, le Seigneur m’y invite. Pardonner à celui qui m’a blessée, bien sûr que je sais que c’est ce que je dois faire, mais le vouloir vraiment, et faire le pas, en décidant d’avancer pour de bon, voilà qui est loin d’être évident.

n’eST-CE PAS UN PEU FACILE ?  

Est-ce que je veux vraiment pardonner quand je sens en moi colère et tristesse, et un profond sentiment d’injustice ? Et comment pardonner alors que je ne suis même pas certaine que cette personne a conscience de tout ce que son comportement a entraîné pour moi comme blessures, deuils, renoncements ? N’est-ce pas un peu facile ? 

Ce qui est certain, c’est qu’il est si facile d’accuser l’autre, de lui en vouloir, de le faire culpabiliser, de rester enfermée à ressasser tout ce qu’il m’a dit ou fait de blessant et injuste. Il est si facile de le juger, de le condamner, et de se contenter de faire semblant de l’ignorer. Mais cela m’éloigne petit à petit de la joie et de la paix auxquelles j’aspire, jusqu’à avoir l’impression d’étouffer. Celui qui m’a fait du mal reste alors collé à la peau, comme un sparadrap dont on n’arrive pas à se défaire.

pAS APRèS PAS 

Pardonner m’est devenu possible après quelques étapes préalables :

  1. Accepter d’avoir mérité la paix
  2. Accepter de poser un regard juste sur soi
  3. Choisir de ne plus écouter ses peurs
  4. Choisir de demander la grâce de pardonner
  5. Laisser le Seigneur œuvrer
  6. Tout abandonner
  7. Pardonner
  8. Décider de ne plus revenir en arrière

CHEMIN DE RéSILIENCE 

Si le Seigneur nous invite si souvent au pardon, c’est parce qu’Il nous veut libre, vivant. Il m’a fallu du temps pour comprendre qu’en pardonnant, c’est avant tout moi-même qui est libérée, car comme le dit si bien Lewis Smedes : « Pardonner, c’est rendre sa liberté à un prisonnier… et se rendre compte que le prisonnier, c’était vous. » Ainsi, non seulement on se libère de l’autre, mais on peut à nouveau laisser le Seigneur poser sur lui, à travers nous, un regard qui espère et qui ne condamne plus. Je rends sa liberté à cette personne qui m’a blessée, je lui permets de changer et d’avancer, et je me libère de toute rancœur, colère, haine, qui ne faisaient que l’enfoncer… et m’étouffer. Espérer l’autre plutôt que le condamner me permet d’être plus humble, plus douce, plus légère, plus aimante, plus vivante. La vie peut à nouveau couler en moi. Elisabeth Leseur, chrétienne lumineuse du début du 20ième siècle, mettait des mots sur ce qu’on appellerait aujourd’hui la résilience :

« Ne pas tout accepter, mais tout comprendre ;
Ne pas tout approuver, mais tout pardonner ;
Ne pas tout adopter, mais chercher la parcelle de vérité qui s’y trouve enfermée.
Ne repousser ni une idée, ni une bonne volonté, si gauche et faible soit-elle. »

En lui offrant mon pardon, je le laisse avancer sur son chemin, et je me remets en marche à nouveau. Je décide d’arrêter de regarder en arrière, je choisis de cesser de lutter contre cette réalité de ma vie, je deviens responsable, et peux alors enfin l’accueillir et l’accepter.

Jésus nous propose de porter notre croix. Non pas pour qu’elle nous enfonce, mais pour qu’elle nous libère. Oui, décider de porter sa croix libère. Contre tout attente, il y a là un profond chemin de vie. Cette situation blessante et injuste, oui, est vraiment blessante et injuste. Mais le Christ ne nous a jamais dit que la vie serait sans épreuve, sans injustice, ni souffrance. Lui-même, sur terre, en a tant vécues. En allant jusqu’au pardon, je laisse à nouveau Dieu être Dieu en moi. Et je respire enfin. 

 

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Pardonner. qund même. 

Hélène Constantin est formée en physiothérapie et en philosophie, mère au foyer et catéchiste. Photographe familiale, elle est maman de quatre enfants et mariée à Nicolas.

Cette année, en préparant des enfants au sacrement du pardon comme catéchiste, je me suis retrouvée face à un cas de conscience : comment expliquer la beauté du pardon aux enfants, l’importance de se remettre en question et de pardonner, alors que moi-même, je me retrouve bloquée dans une situation blessante dans laquelle il m’est si difficile de pardonner ? Pas possible d’y échapper lorsque je lis chaque matin l’évangile du jour en ce temps de carême… presque chaque jour, le Seigneur m’y invite. Pardonner à celui qui m’a blessée, bien sûr que je sais que c’est ce que je dois faire, mais le vouloir vraiment, et faire le pas, en décidant d’avancer pour de bon, voilà qui est loin d’être évident.

n’eST-CE PAS UN PEU FACILE ?  

Est-ce que je veux vraiment pardonner quand je sens en moi colère et tristesse, et un profond sentiment d’injustice ? Et comment pardonner alors que je ne suis même pas certaine que cette personne a conscience de tout ce que son comportement a entraîné pour moi comme blessures, deuils, renoncements ? N’est-ce pas un peu facile ? 

Ce qui est certain, c’est qu’il est si facile d’accuser l’autre, de lui en vouloir, de le faire culpabiliser, de rester enfermée à ressasser tout ce qu’il m’a dit ou fait de blessant et injuste. Il est si facile de le juger, de le condamner, et de se contenter de faire semblant de l’ignorer. Mais cela m’éloigne petit à petit de la joie et de la paix auxquelles j’aspire, jusqu’à avoir l’impression d’étouffer. Celui qui m’a fait du mal reste alors collé à la peau, comme un sparadrap dont on n’arrive pas à se défaire.

pAS APRèS PAS 

Pardonner m’est devenu possible après quelques étapes préalables :

  1. Accepter d’avoir mérité la paix
  2. Accepter de poser un regard juste sur soi
  3. Choisir de ne plus écouter ses peurs
  4. Choisir de demander la grâce de pardonner
  5. Laisser le Seigneur œuvrer
  6. Tout abandonner
  7. Pardonner
  8. Décider de ne plus revenir en arrière

CHEMIN DE RéSILIENCE 

Si le Seigneur nous invite si souvent au pardon, c’est parce qu’Il nous veut libre, vivant. Il m’a fallu du temps pour comprendre qu’en pardonnant, c’est avant tout moi-même qui est libérée, car comme le dit si bien Lewis Smedes : « Pardonner, c’est rendre sa liberté à un prisonnier… et se rendre compte que le prisonnier, c’était vous. » Ainsi, non seulement on se libère de l’autre, mais on peut à nouveau laisser le Seigneur poser sur lui, à travers nous, un regard qui espère et qui ne condamne plus. Je rends sa liberté à cette personne qui m’a blessée, je lui permets de changer et d’avancer, et je me libère de toute rancœur, colère, haine, qui ne faisaient que l’enfoncer… et m’étouffer. Espérer l’autre plutôt que le condamner me permet d’être plus humble, plus douce, plus légère, plus aimante, plus vivante. La vie peut à nouveau couler en moi. Elisabeth Leseur, chrétienne lumineuse du début du 20ième siècle, mettait des mots sur ce qu’on appellerait aujourd’hui la résilience :

« Ne pas tout accepter, mais tout comprendre ;
Ne pas tout approuver, mais tout pardonner ;
Ne pas tout adopter, mais chercher la parcelle de vérité qui s’y trouve enfermée.
Ne repousser ni une idée, ni une bonne volonté, si gauche et faible soit-elle. »

En lui offrant mon pardon, je le laisse avancer sur son chemin, et je me remets en marche à nouveau. Je décide d’arrêter de regarder en arrière, je choisis de cesser de lutter contre cette réalité de ma vie, je deviens responsable, et peux alors enfin l’accueillir et l’accepter.

Jésus nous propose de porter notre croix. Non pas pour qu’elle nous enfonce, mais pour qu’elle nous libère. Oui, décider de porter sa croix libère. Contre tout attente, il y a là un profond chemin de vie. Cette situation blessante et injuste, oui, est vraiment blessante et injuste. Mais le Christ ne nous a jamais dit que la vie serait sans épreuve, sans injustice, ni souffrance. Lui-même, sur terre, en a tant vécues. En allant jusqu’au pardon, je laisse à nouveau Dieu être Dieu en moi. Et je respire enfin.