Saisir l’instant et vivre l’éternité

Hélène Constantin est formée en physiothérapie et en philosophie, mère au foyer et catéchiste.
Photographe familiale, elle est maman de quatre enfants et mariée à Nicolas.

Depuis quand n’avez-vous pas pris le temps d’admirer le visage de votre enfant ? Pris le temps de sentir son odeur, même s’il n’est plus un bébé ? Pris le temps de vous rendre compte à quel point votre petite fille devient une grande ?

Mon quotidien de maman est tellement rempli que, souvent, je n’ai le temps de faire que le nécessaire. Je me limite à suivre tous ces affolants petits points dans l’agenda de mon iPhone. Vous savez ce qui est dramatique quand on se limite à ça ? Nous passons bien souvent à côté de l’instant présent.

1 – Je n’ai rien que maintenant

Le temps… passionnant sujet pour la philosophe que je suis, mais encore plus pour la maman que j’essaie d’être. Saint Augustin disait que le temps n’a d’autre réalité que de disparaître. Dites “présent” et il est déjà passé. Ca donne le vertige, parce cela signifie que l’instant présent n’existe que si j’y suis attentive. Il n’existe qu’à la mesure de ma capacité d’attention: si je suis dans mes pensées sur ce qui s’est passé hier, ou sur ma to do list de la semaine, l’instant présent qui m’est donné, disparaît sans que j’ai pu prendre le temps de le saisir. Il existe bien sûr, – la réalité est là indépendemment de moi -, mais moi je n’y suis pas présente, alors il file dans le passé avant même que j’ai pu le vivre dans le présent.

Vous connaissez sûrement ce magnifique verset de sainte Thérèse :

“Ma vie n’est qu’un instant, une heure passagère
Ma vie n’est qu’un seul jour qui m’échappe et qui fuit
Tu le sais, ô mon Dieu ! pour t’aimer sur la terre
Je n’ai rien qu’aujourd’hui !…

Un chanoine du Grand-St-Bernard avec qui je discutais de ce sujet me disait qu’on peut remplacer le dernier mot : “… pour t’aimer sur la terre, je n’ai rien que maintenant !…”

2 – Dire : « stop ! »

Oui, maintenant, m’arrêter, regarder la personne en face de moi, et rendre grâce pour son existence. Maintenant, arrêter de perdre mon temps sur facebook, éteindre mon ordi, et jouer avec mon enfant. Maintenant, ralentir mon rythme, me faire un café, et le boire avant qu’il ne refroidisse. “L’instant présent a un avantage sur tous les autres : il nous appartient” dit Colton. Savourer le silence. Ecouter Bach. S’émerveiller devant la beauté de la nature. Profiter du câlin de mon enfant qui vient me demander de le prendre dans ses bras. M’ouvrir à la présence du Seigneur, et me mettre en Sa Présence : “Merci Seigneur pour ma vie. Merci d’être là. Merci pour ta fidélité. Merci pour tes enfants que Tu me confies.”

Il nous faut arriver à prendre du recul sur notre quotidien, avoir le recul minimum pour dire : stop ! Ra-len-tir… et se mettre à l’écoute du réel. Quelqu’un disait, lors d’une conférence d’Alliance Vita, qu’on ne peut pas être présent, vite ! Comme c’est notre corps qui nous rend présent, alors demandons-nous : comment ai-je touché ceux que j’aime aujourd’hui ? Comment ai-je posé mon enfant dans son siège auto? Combien de fois lui ai-je demandé de se dépêcher depuis de ce matin?

3 – L’éternité commence maintenant

Pourquoi finalement est-ce si dramatique de ne pas saisir l’instant? Parce qu’en étant présent au présent, je suis dans l’éternité. Le philosophe François Xavier Bellamy dit que “l’éternité, c’est l’absolu du présent.” Lu-mi-neux. L’éternité n’est donc pas uniquement la réalité qui m’attend après ma mort lorsque je verrai Dieu face à face. Si la vie est éternelle, c’est parce qu’elle est hors du temps : elle est tout le temps ! “Si Jésus nous ouvre la vie éternelle, c’est qu’il nous oblige à renoncer à nos frontières entre la vie ici-bas et la vie dans l’au-delà : c’est la même vie ! La vie éternelle commence maintenant, et elle se poursuit éternellement.” A. Candiard*

Ainsi, lorsque je rends grâce pour ce qui m’est donné de vivre aujourd’hui, lorsque je prends le temps d’aimer, et de me laisser aimer, je laisse l’éternité s’engoufrer dans ma vie. N’est-ce pas ça finalement l’espérance ? “Espérer, c’est quelque chose de très concret : c’est croire que Dieu nous rend capable de poser des actes éternels. Que, quand nous aimons, cet amour n’est pas simplement un beau sentiment dans une marée d’absurdité vouée à la mort, mais une fenêtre que nous ouvrons sur l’éternité. Car ces actes éternels, ces actes que nous pouvons faire et dont le fruit est éternel, ce sont bien sûr les actes d’amour, les seuls qui comptent. Ce sont eux qui construisent, dans notre monde déjà, l’éternité, le Royaume de Dieu.” A. Candiard*

* Si ce sujet de l’éternité et de l’espérance vous passionne aussi, je vous conseille vivement le petit livre d’Adrian Candiard “Veilleur, où en est la nuit ?” aux éditions du Cerf.

Articles d’Hélène
Consentir au réel et rendre grâce

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Comment garder le cap de l’espérance quand l’espoir d’une amélioration de la situation sanitaire s’effrite de semaines en semaines ? Et si cette situation allait encore durer plusieurs mois ? Où trouver la force de tenir face à un réel si contraignant et frustrant, qui ne correspond pas vraiment à nos plans et projets ?

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Pardonner. Quand même.

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Saisir l’instant et vivre l’éternité

Hélène Constantin est formée en physiothérapie et en philosophie, mère au foyer et catéchiste. Photographe familiale, elle est maman de quatre enfants et mariée à Nicolas.

Depuis quand n’avez-vous pas pris le temps d’admirer le visage de votre enfant ? Pris le temps de sentir son odeur, même s’il n’est plus un bébé ? Pris le temps de vous rendre compte à quel point votre petite fille devient une grande ?

Mon quotidien de maman est tellement rempli que, souvent, je n’ai le temps de faire que le nécessaire. Je me limite à suivre tous ces affolants petits points dans l’agenda de mon iPhone. Vous savez ce qui est dramatique quand on se limite à ça ? Nous passons bien souvent à côté de l’instant présent.

1 – Je n’ai rien que maintenant

Le temps… passionnant sujet pour la philosophe que je suis, mais encore plus pour la maman que j’essaie d’être. Saint Augustin disait que le temps n’a d’autre réalité que de disparaître. Dites “présent” et il est déjà passé. Ca donne le vertige, parce cela signifie que l’instant présent n’existe que si j’y suis attentive. Il n’existe qu’à la mesure de ma capacité d’attention: si je suis dans mes pensées sur ce qui s’est passé hier, ou sur ma to do list de la semaine, l’instant présent qui m’est donné, disparaît sans que j’ai pu prendre le temps de le saisir. Il existe bien sûr, – la réalité est là indépendemment de moi -, mais moi je n’y suis pas présente, alors il file dans le passé avant même que j’ai pu le vivre dans le présent.

Vous connaissez sûrement ce magnifique verset de sainte Thérèse :

“Ma vie n’est qu’un instant, une heure passagère
Ma vie n’est qu’un seul jour qui m’échappe et qui fuit
Tu le sais, ô mon Dieu ! pour t’aimer sur la terre
Je n’ai rien qu’aujourd’hui !…

Un chanoine du Grand-St-Bernard avec qui je discutais de ce sujet me disait qu’on peut remplacer le dernier mot : “… pour t’aimer sur la terre, je n’ai rien que maintenant !…”

2 – Dire : « stop ! »

Oui, maintenant, m’arrêter, regarder la personne en face de moi, et rendre grâce pour son existence. Maintenant, arrêter de perdre mon temps sur facebook, éteindre mon ordi, et jouer avec mon enfant. Maintenant, ralentir mon rythme, me faire un café, et le boire avant qu’il ne refroidisse. “L’instant présent a un avantage sur tous les autres : il nous appartient” dit Colton. Savourer le silence. Ecouter Bach. S’émerveiller devant la beauté de la nature. Profiter du câlin de mon enfant qui vient me demander de le prendre dans ses bras. M’ouvrir à la présence du Seigneur, et me mettre en Sa Présence : “Merci Seigneur pour ma vie. Merci d’être là. Merci pour ta fidélité. Merci pour tes enfants que Tu me confies.”

Il nous faut arriver à prendre du recul sur notre quotidien, avoir le recul minimum pour dire : stop ! Ra-len-tir… et se mettre à l’écoute du réel. Quelqu’un disait, lors d’une conférence d’Alliance Vita, qu’on ne peut pas être présent, vite ! Comme c’est notre corps qui nous rend présent, alors demandons-nous : comment ai-je touché ceux que j’aime aujourd’hui ? Comment ai-je posé mon enfant dans son siège auto? Combien de fois lui ai-je demandé de se dépêcher depuis de ce matin?

3 – L’éternité commence maintenant

Pourquoi finalement est-ce si dramatique de ne pas saisir l’instant? Parce qu’en étant présent au présent, je suis dans l’éternité. Le philosophe François Xavier Bellamy dit que “l’éternité, c’est l’absolu du présent.” Lu-mi-neux. L’éternité n’est donc pas uniquement la réalité qui m’attend après ma mort lorsque je verrai Dieu face à face. Si la vie est éternelle, c’est parce qu’elle est hors du temps : elle est tout le temps ! “Si Jésus nous ouvre la vie éternelle, c’est qu’il nous oblige à renoncer à nos frontières entre la vie ici-bas et la vie dans l’au-delà : c’est la même vie ! La vie éternelle commence maintenant, et elle se poursuit éternellement.” A. Candiard*

Ainsi, lorsque je rends grâce pour ce qui m’est donné de vivre aujourd’hui, lorsque je prends le temps d’aimer, et de me laisser aimer, je laisse l’éternité s’engoufrer dans ma vie. N’est-ce pas ça finalement l’espérance ? “Espérer, c’est quelque chose de très concret : c’est croire que Dieu nous rend capable de poser des actes éternels. Que, quand nous aimons, cet amour n’est pas simplement un beau sentiment dans une marée d’absurdité vouée à la mort, mais une fenêtre que nous ouvrons sur l’éternité. Car ces actes éternels, ces actes que nous pouvons faire et dont le fruit est éternel, ce sont bien sûr les actes d’amour, les seuls qui comptent. Ce sont eux qui construisent, dans notre monde déjà, l’éternité, le Royaume de Dieu.” A. Candiard*

* Si ce sujet de l’éternité et de l’espérance vous passionne aussi, je vous conseille vivement le petit livre d’Adrian Candiard “Veilleur, où en est la nuit ?” aux éditions du Cerf.