5 pistes pour vivre un deuil en famille

L’abbé Joël Pralong est prêtre du diocèse de Sion et auteur de nombreux ouvrages de spiritualité.
Il est supérieur du Séminaire de son diocèse.

Un jour un enfant de 5 ans demanda à son grand-père : « Quand tu seras mort, je ne te verrai plus ? » Alors l’ancien planta un petit arbre, accompagné de son petit-fils. Il lui parla ainsi : « Vois cet arbre que nous avons mis en terre ensemble. Quand je ne serai plus là, tu viendras souvent l’arroser et tu penseras à moi. Lorsqu’il fleurira au printemps, tu te diras que ton grand-père te sourit, et quand il portera du fruit, tu penseras à tout l’amour qu’il t’a donné et qu’il te donne encore depuis le beau jardin de Dieu. » Ainsi fit l’enfant. Il comprit que son papy était toujours vivant quelque part, dans son cœur et dans le jardin de Dieu.

J’entends souvent des familles me dire : « Vaut mieux pas que notre petit voie son grand-papa ou grand-maman dans le cercueil, il va être traumatisé… Et puis, va-t-on vraiment l’emmener avec nous à l’enterrement ? ». Voici cinq pistes de réflexion pour vous aider à accompagner les enfants lors du deuil d’un proche :

1 – Accueillir la simplicité des enfants face à la mort

Nos enfants sont simples, et ils savent simplifier des mystères qui nous dépassent, avec des mots tout simples, jaillis de leur cœur pur. Les enfants ont un rapport tout autre avec la mort. Pour eux, la mort n’existe pas, c’est simplement que l’être cher vit ailleurs, et que peut-être il reviendra…. Dernièrement je célébrais l’enterrement d’un ami, un père de famille avec deux enfants, 5 et 6 ans. Et j’ai admiré la réaction de la maman. Elle amena ses deux petits à l’hôpital pour voir le corps de leur papa. Les deux enfants le touchèrent et le couvrirent de dessins, avec un naturel émouvant. « C’est bien dommage qu’il soit parti, dit le petit de 5 ans, parce que c’était un homme bon. » Puis suivi l’enterrement où les deux bambins voulurent être actif : l’un en portant la gerbe de fleur et l’autre la croix. Et, durant toute la cérémonie, ils jouèrent silencieusement dans leur banc, près de leur maman.

2 – Recevoir la prière comme ouverture d’un dialogue

La prière permet de tracer un chemin entre le corps visible et ce papa plus du tout présent « ici » mais quelque part « ailleurs », mais bien présent. La prière va ouvrir un dialogue : « Papa, tu es dans nos cœurs, c’est vrai, on aimerait bien te voir, mais nous savons que ce n’est plus possible. Mais tu es là et tu veilles sur nous. Jésus, prends bien soin de notre papa, garde-le bien sur ton cœur ! »

Nous vivons dans une société qui veut cacher la mort parce que nous avons perdu la simplicité de l’enfant qui, naturellement, est ouvert aux choses de Dieu, aux choses du ciel. Une société qui cherche son plaisir dans l’immédiat, et qui nous fait oublier notre condition d’homme mortel appelé pourtant vers un but transcendant. Le Dr Viktor Frankln, un psychiatre autrichien, déclare : « Notre société a tout ce qu’il lui faut pour vivre, mais elle a perdu le sens réel de la vie. Elle vit avec des « comment » être heureux, mais sans se poser la question du « pour-quoi » ou « vers quoi ou vers qui » être heureux. » Il est vrai que nous pouvons avoir une santé de fer, rêver d’être toujours jeune, repousser l’idée de la vieillesse et nier la mort, et pourtant… La réalité finit toujours par nous rattraper. Nous vivons avec la mort, et la mort nous ouvre à la vie, à une autre vie, lorsque nous l’affrontons et en parlons.

3 – Oser parler de la mort des proches

Certes, il ne faut pas parler de la mort aux enfants, mais lorsqu’elle survient chez un proche, il faut l’aborder, en parler, puis écouter l’enfant. C’est important de l’amener sur le cimetière, comme le jardin du souvenir, pour déposer un dessin sur la tombe de l’être cher. A sa manière il apprivoisera la mort. Viendra le moment où l’enfant grandissant, devenant ado, se posera et posera d’autres questions face au manque, à la carence qu’il ressentira. Mais la mort ne lui semblera plus étrangère, il aura appris à la regarder en face. La manière dont il l’aura vécue, enfant, atténuera les le ressenti peut-être douloureux à ce moment-là.

4 – Répondre aux questions plutôt que de les devancer

Enfin, comme le souligne un psychologue : « Nous nous identifions beaucoup à nos enfants : nous nous projetons dans leurs émotions, nous nous demandons ce que nous aurions ressenti au même âge. Dès lors, tout dépend de la façon dont nous, enfants, avons été confronté à la mort, ou à l’angoisse d’abandon. Ceux qui ont souffert dans l’enfance d’un divorce, d’un décès, d’un parent dépressif qui les aurait abandonné psychiquement, ou de n’importe quel autre type de perte, auront plus de difficultés à aborder ces questions, parce qu’ils auront tendance à projeter leurs propres souffrances sur leurs enfants. Enfin, certaines appréhensions plus basiques peuvent nous freiner : la peur de traumatiser l’enfant, de lui renvoyer des images mortifères, de générer chez lui des angoisses sur les causes de la mort… Ce qui peut en effet arriver. C’est pourquoi il me semble préférable de répondre à leurs questions plutôt que d’essayer de les devancer. »

5 – Écouter les enfants, miroirs d’Évangile

Donc, écoutons nos enfants, soyons simples avec eux car « Frères, aucun d’entre nous ne vit pour soi-même, et aucun ne meurt pour soi-même: si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur; si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur. Car, si le Christ a connu la mort, puis la vie, c’est pour devenir le Seigneur et des morts et des vivants. » (Rm 14, 7-10)

Car nos enfants sont miroir d’Evangile.

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